samedi 29 mars 2008

La gestion de l’accord de Ouaga

REACTION DE TIBURCE KOFFI A L’INTERVIEW DE SORO GUILLAUME (1)

Dans sa livraison du 16 au 22 mars 2008, Jeune Afrique nous a permis de lire une interview de l’actuel Premier ministre de Côte d’Ivoire, Soro Guillaume. Le texte, intitulé « Les vérités de Guillaume Soro », a dû retenir l’attention de nombreux ivoiriens qui, comme moi, s’intéressent de très près à la politique qui a cours sans leurs pays. Cette interview, quoique professionnellement bien menée (en ce sens qu’elle a veillé à toucher à des questions essentielles de la vie politique des Ivoiriens, en plus du fait que le journaliste n’a, à aucun moment de sa démarche, franchi la ligne de neutralité indispensable à la conduite d’une interview), mérite cependant qu’on s’y arrête pour questionner encore les réponses non satisfaisantes, poser les questions non posées, et dire le discours, libre, que le cadre d’une interview ne pouvait accorder au journaliste. Commençons par n’importe lequel des points abordés.

1 – De l’accord de Ouaga
M. Soro, à l’instar du chef de l’Etat Laurent Gbagbo, en est satisfait — le contraire aurait d’ailleurs étonné plus d’un ivoirien. Je note pour ma part la concomitance de leurs propos, comme s’ils s’étaient entendus pour faire diffuser dans des organes différents, ces satisfecit qui jurent cependant avec la réalité des faits et les sentiments de la population. Je rappelle qu’au terme de sa durée, l’accord de Ouaga devait amener le peuple ivoirien aux urnes, à l’issue de la réalisation de plusieurs étapes définies par un échéancier clair et précis. On sait qu’aucune de ces échéances n’a été respectée ; mais on sait surtout que la durée de cet accord a expiré sans que son but ultime soit atteint. En matière d’évaluation, on appelle cela « objectif non atteint ». Par rapport à l’horizon d’attentes et d’espoirs (personnellement, je n’en avais pas) suscités par cet accord, on dit tout simplement qu’on a échoué.

Un échec que l’on pourrait expliquer ou même excuser ; toujours est-il que c’est un échec parce qu’on n’a pas atteint l’objectif qui, je le répète était de faire se tenir les élections. Pourquoi et comment donc MM. Soro et Laurent Gbagbo, peuvent-ils nous abreuver de satisfecit et nous faire croire que Ouaga a rempli la mission qu’il s’était donné ? Pourquoi ne pas reconnaître objectivement cet échec, en déterminer froidement les causes et tirer sereinement les conséquences de cette situation afin d’en envisager une meilleure approche ?

Comme M. Gbagbo son allié, M. Soro persiste et signe : Ouaga est une réussite. Examinons les raisons qu’il nous expose pour justifier son satisfecit.

A propos du gouvernement, M. Soro note : « Le gouvernement que je dirige a une particularité : il est composé de représentants des six plus grandes forces politiques du pays. Prétendre que cette équipe a échoué revient à dire que l’ensemble de la classe politique ivoirienne a échoué. »

Pour tout ivoirien, il ne fait aucun doute que la classe politique ivoirienne a effectivement échoué ; et il n’y a vraiment que M. Soro seul, pour soutenir la thèse contraire. La matérialisation indiscutable de cet échec, est ce pays délabré physiquement, économiquement et surtout, sur le plan éthique. Mais, pour les Ivoiriens, la preuve la plus parlante de l’échec de la classe politique ivoirienne est cette rébellion qui a balafré le pays, meurtri le corps, l’esprit et l’âme de ses habitants ; cette rébellion dont un des plus violents porte-parole se nomme Soro Kigbafori Guillaume. Et il est plus que jamais important que ce dernier sache que, n’eût été la peur de se faire tuer par les rebelles (qui tiennent toujours sous le joug des armes nos populations du Centre, du Nord et de l’ouest montagneux) et par les hommes de Gbagbo (qui sévissent en zones sous contrôle gouvernemental), il y a longtemps que ce peuple, las des inconduites et irresponsabilités de cette classe politique, aurait envahi les pavés pour hurler à la face du ciel, son refus, tout son refus de la voir présider encore aux destinées de ce pays.

Oui, M. Soro Guillaume, je puis vous dire et redire que le peuple de Côte d’Ivoire est vraiment fatigué de cette classe politique qui a ECHOUE, en signant son passage par mille et un manquements civiques, étatiques et éthiques. N’entendez-vous pas les ritournelles des chansons zouglou qui, presque toutes aujourd’hui, se font l’écho des déceptions de ce peuple las de vos régences brouillonnes, violentes, traumatisantes et improductives ? Moi, j’entends chaque jour, remonter vers moi, les plaintes et souffrances de toutes les populations de Côte d’Ivoire, même celles du Nord — qui se sont enfin réveillées de l’illusion de l’ordre nouveau que vous leur aviez promis hier en venant secouer la Côte d’Ivoire des clameurs de vos kalachnikovs. Oui, M. Soro, cette classe politique a indiscutablement échoué !

Les jugements supplétifs et la zone de confiance

REACTION DE TIBURCE KOFFI A L’INTERVIEW DE SORO GUILLAUME (2)

1. Les jugements supplétifs
Je me demande bien si M. Soro réalise la gravité des propos qu’il a tenus, à ce sujet : était-ce pour délivrer 380 000 malheureux jugements supplétifs à des gens de ce pays, que les enfants du Nord ont pris les armes contre ce régime et la Côte d’Ivoire ? Il me plaît ici de rappeler aux Ivoiriens, aux enfants du Nord surtout, et particulièrement à M. Soro Guillame le rebelle, que M. Charles Konan Banny, qui n’avait pourtant rien à y avoir dans cette sale crise qui nous a tous éclaboussé, était allé plus loin que Soro-le-justicier-du Nord, dans l’acte de délivrer ces pièces : sous la primature de M. Banny, les audiences foraines devraient, en effet, être sanctionnées de manière concomitante, par la délivrance d’un certificat de nationalité, afin de gagner du temps (pour qu’on puisse aller ‘’vite, vite, vite’’ aux élections certes), mais aussi et surtout, afin de réparer, concomitamment, la grave injustice qui avait justifié la rébellion : la citoyenneté ivoirienne refusée à des milliers d’entre les nôtres victimes d’une méchante discrimination administrative.

Or, que constatons-nous aujourd’hui, sur cette question précise ? Apparemment, M. Soro Guillaume, le rebelle, affiche moins d’ambition que M. Banny ; et je comprends que M. Gbagbo puisse être content et même fier de lui ; mais que M. Soro en soit lui-même satisfait, cela me paraît une attitude curieuse, voire peu sérieuse…N’est-il pas « déçu par le faible nombre de jugements supplétifs délivrés par les audiences foraines » — c’est le journaliste qui pose la question ? » M. Soro répond : « Ce sont ceux qui ont fait les estimations au départ qui doivent les revoir à la baisse. » Oui, vous avez bien lu.

Question à la réponse : qui a fait ces estimations ? Pas M. Gbagbo ni le FPI, en tout cas. Mais bel et bien ceux qui ont pris les armes, ou bien alors ceux qui ont armé les bras des enfants de ce Nord vengeur d’hier. M. le Premier ministre Guillaume Soro, à l’exercice du pouvoir, veut-il alors nous dire qu’il vient de réaliser que ses compagnons d’armes et lui s’étaient trompés ? Est-il alors en train d’inviter la rébellion à revoir ses ambitions à la baisse ? Qu’il le dise donc, clairement ! Qu’il le confesse donc, avec les mots du contrit, et qu’il achève de disqualifier cette hussarderie d’une nuit blafarde de septembre 2002 qui n’a que trop duré.

2. Le démantèlement de la zone de confiance
M. Soro fait aussi du démantèlement de la zone de confiance, un acquis positif de l’accord de Ouga, car selon lui, « la zone de confiance (…) divisait le pays en deux ». Le propos est gravement falsificateur. Rectifions donc les choses. Non, M. Soro, ce n’est pas la zone de confiance qui (a divisé) ou divisait le pays en deux. C’est la REBELLION QUI DIVISAIT et DIVISE toujours le pays en deux. Et ceci n’est pas une nuance, ni une vaine métaphore : c’est cela la réalité. La preuve de ce que je dis là, est que, depuis, le 16 avril (bientôt un an donc) que cette zone de confiance a été démantelée, les rebelles contrôlent toujours les zones qu’ils occupent, continuent de prélever des impôts, gardent leurs privilèges de seigneurs de guerre. Récemment, le général (ou colonel ou maréchal – je ne sais plus quoi) Bakayoko a lancé un appel clair et sans équivoque aux rebelles en les invitant à ne pas libérer les maisons qu’ils occupent indûment.

Pour nous Ivoiriens, la division du pays, c’est cela : cette gestion duelle de notre pays, cette administration fantaisiste et bâtarde, ces deux légalités à la fois formelles (la zone sud) et informelles (la zone sous contrôle des rebelles). Et, tant qu’au démantèlement de la zone de confiance, ne succédera pas le désarmement total et effectif de la rébellion et des milices armées de M. Gbagbo, tant que l’administration du pays entier se fera dans l’acceptation complaisante et anti-républicaine de la présence illégale des rebelles aux postes de commandes, le territoire ivoirien n’aura pas été réunifié.

Pour avoir été ministre d’Etat dans le gouvernement de M. Banny, M. Soro sait très bien que le démantèlement (qui ne posait aucun problème) de la zone de confiance était inscrit dans le programme d’action de l’ex Premier ministre. Mais, et à l’inverse de la démarche de la paire Gbagbo-Soro, M. Banny concevait ce démantèlement (facile à faire) comme un des points de l’apothéose qui sanctionnerait la paix vraiment retrouvée (par le désarmement effectif) de la rébellion et des milices de la zone gouvernementale. Le démantèlement de la zone de confiance n’est donc pas un acquis de l’accord de Ouaga. Il était déjà un acquis sous M. Banny. Evitons la récupération facile.

L’action de la rébellion

REACTION DE TIBURCE KOFFI A L’INTERVIEW DE SORO GUILLAUME (3)

1. Violations de droits de l’homme
Interpellé par le journaliste sur ces violations des droits de l’homme par les rebelles, M. Soro dit ceci : « Je regrette la façon sommaire dont ces organismes travaillent : la rébellion ivoirienne n’a jamais coupé de bras, ni violé, ni creusé des charniers ». Pour peu, M. Soro nous dirait que la rébellion n’a jamais tué ! Comme c’est triste !

Allons, nous faudrait-il dispenser des cours de morale à notre Premier ministre pour qu’il sache que tuer des civiles désarmés est un acte de violation des droits de l’homme ? Et que cela justifie une interpellation de la part de l’ONU et des organismes humanitaires ? Les Escadrons de la mort, tout aussi dénoncés par L’ONU, n’ont jamais non plus, violé, ni coupé de bras. Leurs crimes sont-ils moins des crimes ?

M. Soro doit faire l’effort de comprendre que l’inacceptabilité d’un crime n’est pas fonction du bras, de l’oreille ou des testicules de la victime que le criminel a laissé (s) intact/s/ (sans doute pour d’insolites raisons esthétiques), mais du principe même du crime ; c’est-à-dire l’acte de tuer un homme, d’ôter (pour quelque raison que ce soit) la vie à notre semblable. C’est un acte prohibé par toutes les cultures du monde, du plus lointain de notre Humanité naissante aux âges avancés d’éclaircie morale. Malgré nos égarements actuels, nous Ivoiriens, sommes, après tout, des gens civilisés, bons et gentils ; nous n’avons pas de tradition de crimes. Cette guerre est un malheur qui nous est arrivé, et nous devrions en être gêné. Nous n’avons pas à chercher à justifier des tueries, ni à établir une hiérarchie esthétique dans les manières de tuer. Bon Dieu ! Ce pays a tout de même des intellectuels, des gardiens de l’éthique millénaire des peuples ! Et nous ne saurions tolérer outre mesure que notre Premier ministre tienne des propos aussi gauches et indécents pour la morale, que ceux qu’il a tenus à Jeune Afrique à propos de ses tueries, et qui sont diffusés dans le monde entier. C’est une honte pour mon pays. Non, M. Soro, il s’agit de la Côte d’Ivoire, tout de même !!!

2. Exactions dénoncées par Humain Right Watch et le Haut Commissariat de l’ONU.
Et puis, en réalité, les viols de la rébellion ne se content plus : les dépositions des rescapées de l’enfer de Bouaké, Béoumi, Sakassou, Monoko Zohi, Guitrozon, etc., et des contrées saccagées et soumises par la rébellion, sont encore dans nos mémoires. Nous les avons entendues à l’Assemblée nationale, et en direct. Peut-être que M. Soro ignore l’existence de ces documents audiovisuels qui font partie des archives de la rébellion ; archives qu’il tenait à détruire en cherchant à tous les prix à gérer le ministère de la Communication et à placer ses hommes à la tête des medias d’Etat… pour falsifier notre histoire. Peine perdue ! Ces documents ont été bien conservés. Et nous sommes un certain nombre de (vrais) patriotes ivoiriens, hier membres du ‘‘bois sacré’’, à savoir où ils se trouvent. Les témoins des supplices endurés ne les ignorent pas, les Ivoiriens des zones libres, non plus ; les victimes de ces cas de viols, encore moins.

La rébellion du Nord a fait aussi des charniers – c’est connu. Il est vrai que M. Soro appelle cela « fosse commune » ; mais nous ne sommes pas obligés d’admettre cette nuance macabre, insalubre et suspecte qui veut altérer le crime, et qui offense la mémoire des corps suppliciés. Quoi ! Ces hommes qui sont morts, étouffés dans un conteneur surchauffé sous un soleil canaille de Korhogo, ces gendarmes désarmés et exécutés lâchement et froidement à Bouaké, puis enterrés dans une fosse commune, tous ces cauchemars de notre septembre noir de 2002, relèvent-t-il d’une banale esthétique fictionnelle ? Non, M. Soro, non !

M. Guillaume Soro peut chercher à se faire une nouvelle virginité (si tant est qu’il ait jamais été vierge !) en abusant de la générosité complaisante des simples d’esprit, mais pas de la vigilance de ma mémoire, ni de celle des Ivoiriens lucides et sérieux. Je l’invite donc à observer un peu de décence sur ces questions hautement éthiques et humanitaires. Car les propos qu’il y émet heurtent sérieusement ma sensibilité d’intellectuel et offensent le double humanisme chrétien et bossoniste (animiste si vous préférez) qui fondent mon éducation.

3. Pillage des mines de diamant de Séguéla, rapports avec des chefs d’Etat africains

J’avoue qu’ici, M. Soro m’a sidéré dans la réponse qu’il a donnée au journaliste. Lisez-la : « Le diamant a toujours été exploité par la population et par des trafiquants. Bien avant la crise. J’ai dit aux Forces impartiales que je suis prêt à faire surveiller cette mine si elles me le demandent ».

Si je comprends bien, M. le Premier ministre de la République indépendante et souveraine de Côte d’Ivoire, attend des Forces impartiales, qu’elles lui disent de prendre des mesures pour faire arrêter le pillage des richesses du pays qui est placé sous sa primature ! Question : sont-ce les Forces impartiales qui ont demandé aux rebelles de piller le diamant ivoirien pour le vendre au Burkina et au Mali ?

Le filleul de chefs d’Etat dépassés

REACTION DE TIBURCE KOFFI A L’INTERVIEW DE SORO GUILLAUME (4)

M. Soro décline dans cette interview, l’affection et l’amour que des chefs d’Etat africains éprouvent pour lui. Pour peu, il fondrait en larmes et on exulterait avec lui. Il dépeint ainsi le Président Blaise Compaoré sous les traits d’ « un patriote africain » (qu’est-ce que cela signifie ?) « qui a une véritable vision de l’avenir ! » Je ne sais pas s’il est possible (à part chez les géomanciens) d’avoir une ‘‘vision du passé’’, et à quoi cela correspondrait. M. Soro nous dit aussi sa fierté de compter au nombre des filleuls bien-aimés du Président Bongo. Ecoutez-le nous en parler sur des notes attendrissantes qui feraient pleurer de repentir, plus d’un opposant gabonais : « Il faut approcher Omar Bongo pour saisir toute sa dimension (…) Il n’a rien à voir avec la caricature que les journaux occidentaux font de lui (…) Il s’est pris d’affection pour moi et me traite comme son propre fils. Je me réjouis de cette relation. »

Demandons tout simplement à M. Soro s’il est sûr que le gentil Président Bongo se prendrait d’affection pour un jeune gabonais qui déclencherait une rébellion armée contre l’institution présidentielle gabonaise ? J’en doute. Tout comme je doute fort que le Président Bongo puisse présenter Soro à la jeunesse gabonaise comme exemple de jeune à imiter ! Je suis même certain que le M. Bongo a pris soin d’expliquer aux leaders d’associations de jeunes de son pays, qu’il ne faut surtout pas suivre l’exemple de ce garçon (Soro) qui a divisé son pays en deux et en a retardé la marche !!!

Ecoutez-moi, monsieur Guillaume Soro Kigbafory : du haut de mon droit et devoir d’aîné et d’enseignant (parce que je suis votre aîné et votre professeur), je vous le dis fort et sans aucun tremblement de la plume : « Vous êtes naïf ! »… comme dirait l’autre que vous avez… banni ! Si tous ces gens (Bongo, Compaoré, Wade, Biya…), vous aiment, c’est peut-être parce que vous avez créé des problèmes à votre pays la Côte d’Ivoire, dont ils jalousaient, tous, la réussite économique et la stabilité. Grâce à vous, ils peuvent, enfin, eux aussi, rêver de grandeurs, ou au moins, espérer réduire le fossé qui séparait la Côte d’Ivoire d’eux. Grâce à vous, la Côte d’Ivoire est sur le point de perdre le leadership dans la sous région. Votre rébellion les arrange, peut-être… peut-être.

Une chose est certaine : aucun d’entre ces chefs d’Etat qui vous vouent aujourd’hui amour et affection, ne souhaiterait avoir dans son pays, un jeune qui suivrait votre exemple ; parce qu’en réalité, à leurs yeux, vous n’êtes pas un exemple particulièrement bon à enseigner aux jeunes. Vous n’êtes bon à leurs yeux que parce que vous entamez le prestige d’un pays qu’ils jalousaient peut-être, mais surtout parce que vous détestiez/détestez Gbagbo… qu’ils détestent, eux aussi. Et vous savez, moi, de même, pourquoi ils le détestent/détestaient : parce qu’au départ, Gbagbo n’avait pas voulu être comme eux. Oui, je peux en témoigner : je fus un de ses conseillers et un de ses proches. C’était du temps de ‘‘mon’’ bon Gbagbo, le Gbagbo que j’avais aimé et suivi. A présent, c’est réglé : Gbagbo a décidé d’être comme eux ; c’est-à-dire, être un prédateur de son pays, un facilitateur de détournements de deniers publics, d’enrichissements illicites, un partenaire idéal pour le vampirisme des ultra libéraux qui pillent et ravagent le continent africain pour asseoir et entretenir les empires financiers et les paradis fiscaux qui infectent la surface du monde ; bref, un bon serviteur tropical de la bourgeoisie comprador. Pis : un roi nègre… comme tous les autres. Un bon roi nègre, avec le goût farfelu du luxe, la propension à l’amusaille, la fragilité face à l’argent et aux compromissions faciles, le culte de la personnalité, la tentation de l’autocratie – les présidents nègres, tout bon président nègre qui se respecte, est un autocrate affirmé et… aimé par son peuple !

Voilà, cher cadet, vos modèles. A votre âge biologique : 36 ans ! L’enseignant et l’aîné que je suis, peuvent vous le redire d’autorité : vous vous êtes égaré, jeune homme ».

Les ambitions politiques de Soro

REACTION DE TIBURCE KOFFI A L’INTERVIEW DE SORO GUILLAUME (5)

M. Soro nous dit : « S’il y quelqu’un qui veut que les élections se tiennent au plus vite, c’est moi. L’accord de Ouaga m’interdisant d’être candidat, j’ai hâte d’être au lendemain du scrutin pour pouvoir enfin exprimer mes ambitions pour mon pays (…) Vivement les élections qui vont clore un cycle politique et ouvrir la voie à de nouvelles générations ». Ces propos montrent clairement les insuffisances théoriques de M. Soro dans la lecture de sa propre trajectoire et de l’histoire politique d’un pays. Il croit, en effet, qu’il appartient à la génération future d’hommes politiques ivoiriens, porteurs d’espérances nouvelles et nourries d’utopies originales. Il ne sait pas qu’en réalité, selon les lois de la dialectique, et sur le plan historique, il appartient à la génération présente de politiciens enragés et ravageurs qui ont porté le deuil au cœur de la Côte d’Ivoire, et dont les Ivoiriens ne veulent plus. Il croit, tout naïvement, que l’âge biologique se confond avec l’âge politique.

Nous avons le droit et surtout le devoir d’instruire l’élève et le cadet sur ces choses précieuses et subtiles qui ont (inévitablement) échappé à sa jeune sapience. Non, M. Guillaume Soro Kigbafory, vous n’appartenez plus à une nouvelle génération d’hommes politiques ivoiriens. En réalité, sur le plan politique, vous êtes contemporains de Gbagbo, Bédié, Charles Blé Goudé, Ouattara, Mme Diabaté. Vous appartenez déjà à un âge politique qui (et là, je l’admets avec vous) est dépassé, et dont les Ivoiriens ne veulent plus : l’âge des ostrogoths politicus… ivoiriens.

La contemporanéité dont je parle ici n’est pas biologique ; elle est psycho mentale et historique. Lorsque vous aurez le temps de vous instruire un tout petit peu les lois de la dialectique, vous comprendrez cela : votre champ de conscience historique est en réalité le même que celui de Gbagbo, Bongo, Ouattara, Mugabé, Biya, Blé Goudé et autres. Le fait même que vous soyez (et que vous ayez été) le filleul de chacune de ses personnalités politiques est, à cet égard, significatif ; mais c’est encore plus significatif que ces personnalités-là, soient vos modèles. A votre âge biologique ! Avant même l’âge de 30 ans – car il y a longtemps que vous conspirez contre les régimes de ce pays !

Non, M. le Premier ministre, on ne peut pas n’être âgé que de 36 ans, prétendre être révolutionnaire, et prendre comme modèles d’hommes politiques Bongo, Biya, Compaoré, Wade ! En théorie, c’est incompatible avec votre âge biologique. Comme diraient les Ivoiriens avec leur sens inégalable de l’humour : « C’est une combinaison qui ne marche pas. » Or, avec vous, cette combinaison a marché. Parce que vous êtes déjà vieux dans la tête et l’âme. Comme eux.

Ces gens (Bongo, Biya, Compaoré) ont falsifié les constitutions de leurs pays, fait tuer des êtres chers et intimes, des contestataires pacifiques, pillé leurs pays et assis des empires financiers scandaleux en Europe, pendant que leurs peuples baignent dans le manque. Ils ne sont encore au pouvoir que grâce à la redoutable françafrique, car leurs peuples ne les aiment pas/plus. Ils n’incarnent actuellement aucun avenir pour leurs peuples, moins encore pour l’Afrique. Ils n’inspirent aucun futur, aucune utopie charmante, et leurs jeunesses et leurs oppositions ne les aiment pas. Comment faites-vous pour les idolâtrer, vous si jeunes, vous qui êtes à un âge biologique où on doit rêver et rechercher la pureté de l’âme et de l’esprit ? La réponse est simple : parce que vous êtes déjà un dirigeant vieux. Un dinosaure ! M. Soro, si ces gens-là vous aiment (et vous êtes vraiment le seul à croire en cet amour), c’est parce que vous symbolisez une part d’eux…

Voilà donc votre univers mental M. Soro. Voilà les bornes de votre champ de conscience. Et vous croyez les Ivoiriens fous, très fous, véritablement fous, au point de laisser les gens de votre faune politique prospérer davantage dans leurs quotidiens ? Vous croyez que ce pays n’a pas produit de jeunes technocrates, sérieux, compétents, productifs, performants, habités de rêves salubres et salutaires pour un pays comme le nôtre à la recherche de sa grandeur et sa légende perdues ? De jeunes cadres dignes de prendre les commandes de l’Exécutif ? Si, monsieur Soro : ce pays a produit des cadres sérieux pour le sortir du gouffre où vous et vos partenaires et adversaires impossibles l’avez enfoncé. Et ils sont nombreux, plus nombreux que vous ne le croyez.

Vous vous trompez donc si vous croyez que nous allons laisser notre pays tomber entre les mains d’étudiants non suffisamment instruits, violents, destructeurs, qui sont devenus riches par la violence, sans avoir jamais travailler pour gagner leurs vies. Vous vous trompez, si vous croyez que, après la grave erreur que nous avons commise de porter un certain Gbagbo Laurent au pouvoir, les Ivoiriens vont vous laisser, vous et votre générations de militants de la violence, héritiers directs de ce même Gbagbo lui-même apôtre révélé de la violence, de la ruse et du ‘‘mal-in’’, prendre ce pays... pour le piller encore !

Je sais sur quoi vous comptez pour réaliser vos ambitions présidentialistes : vos richesses accumulées au cours de vos pérégrinations hallucinantes et effroyables ! Mais sachez que l’argent — surtout quand il a été mal acquis comme le vôtre — ne peut pas donner accès à tout. Et je puis vous dire ceci : la Côte d’Ivoire de Gbagbo et ses milices, de Soro et ses dozos, finira nécessairement. Votre Côte d’Ivoire du tourment et des milles et une intrigues politiques à dénouer — quand le peuple végète dans la misère et l’insalubrité mythologique des écuries d’Augias — aura une fin. Enfin mon dernier conseil : cherchez à vous repentir pour tout le mal que vous et vos adversaires et partenaires avez fait à cette terre de Côte d’Ivoire, avant de songer à en devenir un jour le chef. C‘est un conseil d’Initié aux choses de l’ombre. Si vous ne suivez pas ce conseil, jeune homme, vous finirez mal, je vous le dis. Très mal.


De Paris, et en lutte pour la libération et la renaissance de mon pays…

Tiburce Koffi

jeudi 20 mars 2008

Crise ivoirienne (1) : Accord de Ouaga, redéploiement - Les contre vérités et inélégances de Gbagbo

Comme a son habitude, le chef de l’Etat Laurent Gbagbo (que l’on pourrait vraiment appeler, désormais, Kuma fatchê « père de la parole » tant il aime parler, s’entendre, se voir à la télévision, dans les journaux, goûter au plaisir de s’entendre à la radio), s’est fait interviewer par la RTI (1). En voilà aussi une autre de nos institutions que l’on pourrait dénommer RTG-S (Radio Télévison Gbagbo-Soro), tant elle s’est inféodée au pouvoir. Une interview de plus donc pour dire… quoi ? Pour parler du merveilleux tandem Gbagbo-Soro, des liens avec l’ami Blaise Compaoré (devenu subitement plus que fréquentable), du rôle de gardien de notre Constitution pour laquelle il (Gbagbo) se bat ; parler de l’Etat, de la vie des Ivoiriens, leurs libertés, les avancées de l’Accord de Ouga, etc. Des discours, des discours. Des parlotes comme dirait Sony Labou Tansi.

Bref, les propos tenus par le chef de l’Exécutif ivoirien m’ont paru loin, très loin de refléter la réalité des faits. Aussi me suis donné la permission d’éclairer les Ivoiriens sur les faiblesses et lacunes de cette énième sortie médiatique malheureuse du chef de l’Etat ivoirien dont les dérapages langagiers sont devenus sujets de blague dans notre pays et à l’extérieur. Suivons progressivement ses propos et démasquons-les.

A propos de l’Etat en tant qu’institution, il dit ceci : « (…) je suis agacé par des commentaires de gens qui ne savent pas comment on gère un Etat. Je crois que la plus grande chose que j’ai faite depuis le 26 octobre 2002 que je suis au pouvoir, a été de défendre la République, l’Etat, les institutions de l’Etat. Aujourd’hui, nous sortons de la crise. Visiblement, nous voyons que l’Etat existe et que les institutions de l’Etat existent. (…) c’est ma plus grande victoire (…) j’en suis fier. Je suis fier d’avoir combattu pour que l’Etat de Côte d’Ivoire existe et qu’il ne soit pas à terre »…

A lire de tels propos, on tombe à la renverse. Mais qui donc a fait croire à M. Gbagbo que dès qu’un pays est en guerre, l’Etat n’existe plus ? Israël a été créé dans la guerre, et vit toujours dans la guerre. L’Etat d’Israël existe bel et bien. Les 27 années de guerre civile n’ont pas fait disparaître l’Etat d’Angola. La question donc n’est pas que l’Etat existe ; mais de savoir dans quel état se trouve l’Etat. M. Gbagbo répond déjà à cette question : « Je suis fier d’avoir combattu pour que l’Etat de Côte d’Ivoire existe et qu’il ne soit pas à terre. J’en suis très fier. »

Je suis certain que M. Gbagbo ne parle pas sérieusement ; car si tel n’était pas le cas, il faudrait alors s’inquiéter de la compréhension qu’il a du concept de l’Etat. N’hésitons pas à l’instruire un tant soit peu sur la question.

Non, M. Gbagbo, l’Etat de Côte d’Ivoire est bel et bien à terre depuis des années, sous votre règne surtout. Voulez-vous savoir comment cela se manifeste-il ? Nous allons vous le dire.

Note :
1/ Fraternité Matin du 14 mars 2008
. Retransmission de l’interview de Laurent Gbagbo à Mama, son village natal, dans le cadre de l’émission télévisée “Le plateau de l’intégration africaine”. Propos recueillis par Paulin N. Zobo, Pascal Soro et Emmanuel Kouassi.

Crise ivoirienne (2) : Accord de Ouaga, redéploiement - Les contre vérités et inélégances de Gbagbo : La déliquescence de l’Etat

Quand, dans un pays, les rues sont barrées par des gens qui portent des tenues militaires et d’autres, de policiers ou de gendarmes (nombreux parmi eux ne sont même pas de ces corps), et qu’ils rackettent les honnêtes citoyens, ralentissent la marche de l’Economie, salissent nos villes, sans que l’autorité qui siège dans les belles loges du Palais ne puisse mettre fin à cette pratique honteuse et inadmissible, c’est que l’Etat est à terre.

Quand, dans un pays, n’importe qui peut se faire coudre ou acheter un uniforme de corps habillés, porter une kalachnikov et se balader à travers la ville, c’est que l’Etat est à terre.

Quand, dans un pays, les cadres de l’administration et les dirigeants, toutes tendances politiques confondues, pillent les caisses de l’Etat, utilisent à des fins personnelles les deniers publics, ruinent l’économie et que, interrogé par le peuple sur cette situation dramatique, le chef de l’Exécutif répond, sans pudeur : « Ce que les gens ne savent pas, c’est que la roue tourne. (…) Je ne peux pas suivre deux écureils à la fois (…) N’attendez pas de moi que je poursuive des voleurs (…) Ceux que vous avez cités ne sont pas les seuls à voler (…) », etc., c’est que l’Etat est à terre.

Quand, dans un pays, n’importe qui peut se construire une baraque dans un espace communal et habiter-là, dans la précarité, sans que cela n’inquiète ni la police ni les forces de sécurité, c’est que l’Etat est à terre.

Quand, dans un pays, des gens, parce qu’ils ont de l’argent, peuvent détruire des parcelles collectives d’espaces verts et y construire quelque château nègre pour eux-mêmes, au mépris de la qualité de vie des habitants des immeubles alentours, c’est que l’Etat est à terre.

Quand le vol, le crime, le racket, le mensonge, l’insalubrité, la prévarication, etc., sont devenues des choses admises et normales dans un pays, c’est que l’Etat est à terre.

Quand, dans un pays, la Santé, l’Ecole, le Transport, le Logement, l’Eau, le Courant, etc., sont aux mains des privés et hommes d’affaires voraces, c’est que l’Etat est à terre, vraiment à terre et qu’il traîne comme un paraplégique au sol.

Quand, dans un pays, c’est dans les rues, sur les trottoirs et les boulevards que les gens (la jeunesse surtout) se livrent au commerce illicite, devant les forces de l’ordre, c’est que l’Etat est à terre.

Quand, dans un pays, la création intellectuelle et artistique est piratée officiellement par des groupes de personnes qui font partie des protégés du chef de l’Etat, et tolérée par les dirigeants ; quand le chef de l’Etat lui-même, rend visite aux délinquants qui prospèrent dans des espaces maffieux comme la « Sorbonne » du Plateau où sont vendus, au vu et su de tout le monde (surtout du chef de l’Etat), le produit de l’effort des artistes, des penseurs et autres créateurs qui vivent et crèvent ainsi dans la misère, c’est que l’Etat est par terre : oui, un régime qui ne respecte pas et ne protège pas ses artistes est un régime maudit et indigne de diriger un peuple.

Quand, dans un pays, des étudiants, protégés et manipulés par le régime, peuvent tuer, dans l’impunité totale, des êtres humains sur les campus, les inhumer dans la brousse, sans être inquiété par quelque autorité que ce soit, c’est que l’Etat est à terre.

Quand, dans un pays, le chef de l’Etat passe le plus clair de son temps à organiser des séances d’allégeance au Palais en faisant se déplacer les populations rurales pour entendre leurs avis sur… quoi — alors que les députés existent qui sont sensés représenter le peuple — c’est que l’Etat est à terre ; parce que le chef de ce pays ne sait pas que les députés représentent le peuple qu’il n’est donc plus utile de déplacer jusqu’au Palais.

Au total, quand, dans un pays, tout se fait dans l’indiscipline, le désordre, quand plus personne n’a peur de cette chose impersonnelle, immatérielle, mais redoutable, qu’on appelle l’Etat, c’est que l’Etat est à terre. Et c’est dans cette situation qu’est la Côte d’Ivoire actuelle, sous Gbagbo. Il faut donc ne pas savoir ce qu’est un Etat pour être fier de ce qui nous sert d’Etat dans la Côte d’Ivoire d’aujourd’hui. Non : manifestement, M. Gbagbo ne sait pas ce que c’est qu’un Etat, moins encore son mode de fonctionnement. Il faut qu’il apprenne à savoir ces choses élémentaires en politique, s’il veut continuer à nous diriger.

Crise ivoirienne (3) : Accord de Ouaga, redéploiement -Les contre vérités et inélégances de Gbagbo : Evitez la surenchère

De l’accord de Ouaga, Gbagbo dit : « Je suis très fier. Quand cette crise a éclaté, nous avons parcouru le monde entier pour faire des négociations. Nous avons signé de nombreux accords jusqu’à ce que dans les responsabilités qui sont les miennes, je comprenne qu’il y avait beaucoup de choses bidons dans tout ce qu’on faisait. (…). Je suis fier qu’on soit arrivé au résultat auquel nous sommes tous parvenus (...) Nous avons signé l’Accord de Ouagadougou le 4 mars 2007. Entre le 4 mars 2007 et aujourd’hui, il y a un an. Chers amis, regardez vous-mêmes, faites le point. Avant, on parlait de guerre; aujourd’hui, on parle d’élections. C’est un progrès immense (…).Je suis fier de l’Accord de Ouagadougou que nous avons signé ».

Les propos que tient le chef de l’exécutif ivoirien sur les bienfaits de l’accord de Ouaga ne sont pas tout à fait exacts. Il nous faire deux précisions importantes.

1 - Il est inadmissible que M. Gbagbo nous dise qu’il lui a fallu quatre ans pour se rendre compte qu’ « il y avait beaucoup de chose bidons dans tout ce qu’on faisait. » Quatre ans d’égarement dans la vie d’un peuple, ce n’est pas peu. En avouant ainsi avoir mis du temps à comprendre ces choses, il nous donne la prouve de son manque de vision et de capacité d’anticipation. Je rappelle qu’il y avait longtemps que M. Bédié était favorable au fait que la Primature revienne à la rébellion. Il fut taxé de parrain de la rébellion pour avoir exprimé ce point de vue. Je rappelle aussi que M. Soro Guillaume avait toujours dit, depuis Marcoussis, que la Primature devait revenir à la rébellion, pour respecter le parallélisme des forces en présence. Je rappelle encore que c’est bien M. Gbagbo qui nous avait dit que Marcoussis était un médicament amer, mais qu’il fallait l’appliquer. Qu’est-ce qui rendait Marcoussis amer ? Tout simplement le fait qu’il nous imposait la cohabitation au sein du gouvernement, avec des rebelles qui avaient pris des armes pour remettre en cause la légalité républicaine et constitutionnelle.

Marcoussis n’avait pas donné la Primature à la rébellion. Que nous auraient dit Gbagbo et ses refondateurs, si Marcoussis nous avait proposé de donner la Primature à la rébellion ? Ils auraient dénoncé (encore) un complot français, de nature chiraquienne, visant à affaiblir leur pouvoir ; et ils auraient poussé les enfants des pauvres dans la rue, qui seraient allés se faire massacrer (encore) pour eux. Quatre ans de tâtonnements plus tard, M. Gbagbo donne (enfin) la Primature à la rébellion et affirme, l’air étrangement satisfait : « Quand cette crise a éclaté, nous avons parcouru le monde entier pour faire des négociations. Nous avons signé de nombreux accords jusqu’à ce que dans les responsabilités qui sont les miennes, je comprenne qu’il y avait beaucoup de choses bidons dans tout ce qu’on faisait ». Enfin, de qui se moque M. Gbagbo ?

M. Gbagbo et les refondateurs ont toujours refusé d’appliquer, au nom de la souveraineté nationale et des prérogatives que leur donnait la Constitution ivoirienne, ce que la Communauté internationale nous demandait de faire. Ils ont géré cette crise comme ils l’entendaient la gérer, refusant le principe du « Plein pouvoirs » au Premier ministre. Et M. Gbagbo ne se gênait pas de clamer devant ses militants, chaque fois qu’il refusait d’appliquer ce qu’on lui proposait : « Je tiens toujours la barre (...) C’est moi qui ait le ballon, je n’ai encore fait la passe à personne !!! » Ces propos sont encore là, dans les journaux, et dans nos mémoires, en tout cas, dans la mienne. Comment donc, M. Gbagbo peut-il aujourd’hui affirmer que la crise a duré à cause des solutions ‘‘bidons’’ que lui avaient imposées la Communauté internationale ? Incroyable !

Dès son retour de Rome en septembre 2002, n’est-ce pas M. Gbagbo qui avait refusé de négocier avec la rébellion, brandissant plutôt l’épée contre l’agresseur ? Et cela, malgré les conseils de M. Bédié (qui avait proposé la négociation directe avec la rébellion) ; malgré aussi les avis de M. Dominique de Villepin qui lui, n’avait eu de cesse de dire : « La solution à la crise ivoirienne n’est pas militaire. »

Comme de nombreux Ivoiriens alors frappés de cécité, j’avais suivi M. Gbagbo dont j’appréciais l’ardeur guerrière. Je confesse avoir été de ceux qui l’avaient encouragé, dans des articles publiés à Notre voie, et Notr’Aurore, à faire l’option de la guerre, plutôt que celle de la négociation qui, dans mon esprit, serait « une vile capitulation (2) », taxant même M. Dominique de Villepin de "vil pain". Comme de nombreux conseillers autour de lui, j’avais cédé à l’émotion plutôt qu’à la raison. Un an plus tard, exactement en mars 2004, quand j’eux compris mon erreur et que j’entrepris de ramener les bellicistes du camp présidentiel à la thèse de la négociation et à l’idéal de paix, je fus désavoué, conspué même ; et des mesures d’ostracisme furent prises à mon encontre au Palais. On m’empêcha désormais d’avoir accès au Prince comme ce fut le cas d’Eugène Djué qui lui, fut plus malchanceux que moi(3). C’est dans cette atmosphère de suspicion et de doute sur ma loyauté envers le camp présidentiel, que je pris des distances vis-à-vis du Palais. Et, depuis ces jours, les choses s’éclairèrent progressivement dans mon esprit, et je compris la trajectoire dans laquelle je devais désormais engager mon combat. Je devins alors attentif, très attentif et surtout, critique aux discours et comportements des refondateurs et de leur chef.

Affirmer donc, comme le fait M. Gbagbo, que c’est la Communauté internationale qui nous avait indiqué des voies ‘‘bidons’’ (parce que autres que celle de la paix avec Soro), est une grave contre vérité historique : un mensonge républicain comme savent nous en servir Gbagbo et ses refondateurs.

Note :
2/ « Cri de révolte », article de Tiburce Koffi publié à « Notre Voie », octobre (?) 2002.
3/ Il fut tabassé au Palais.

Crise ivoirienne (4) : Accord de Ouaga, redéploiement - Les contre vérités et inélégances de Gbagbo : L'obsession de guerre

« Nous avons signé l’Accord de Ouagadougou le 4 mars 2007. Entre le 4 mars 2007 et aujourd’hui, il y a un an. Chers amis, regardez vous-mêmes, faites le point. Avant, on parlait de guerre; aujourd’hui, on parle d’élections. C’est un progrès immense »…

M. Gbagbo se moque vraiment des Ivoiriens ! « Avant, on parlait de guerre ; aujourd’hui, on parlait d’élections ! », nous dit-il. Comme c’est faux, tout cela. Qui parlait de guerre avant ? La rébellion a tourné officiellement le dos à la guerre depuis le 04 juillet 2003 ; et depuis, cette date, elle n’a déclenché aucune offensive armée. Il n’y avait que Gbagbo et les refondateurs qui voulaient à tous les prix faire la guerre. Ce à quoi je me suis insurgé et qui m’avait emmené à écrire l’article « Penser et rêver la Côte d’Ivoire » (Juin 2004, in L’Intelligent d’Abidjan et Le Nouveau Réveil) ; article dans lequel, je dénonçais cette obsession de la guerre (que je ne comprenais pas alors) qui habitait l’esprit des refondateurs.

C’est M. Gbagbo qui a fait déclencher l’offensive armée de novembre 2004 sur Bouaké ; et cela, sans que la rébellion n’ait posé quelque acte de rupture du cessez-le feu et, mieux, dans un contexte de pourparlers qui étaient très avancés, en vue du désarmement. Le Premier ministre Seydou Diarra avait obtenu un accord de désarmement, et le premier dépôt des armes avait été fixé dans la région de Bouna, je crois. Pour briser ce processus, Gbagbo a déclenché, contre toute attente, l’offensive aérienne sur Bouaké ; alors que, 48 heures avant cette attaque, il déclarait à la une d’un numéro de Fraternité Matin : « La guerre ne fait pas partie de mes options ». On sait comment s’est terminée cette odyssée militaire. Dans un pays normal où il existe une opinion civile, la société civile aurait réclamé la démission de cet homme qui avait donc menti au peuple !

Oui, j’affirme que, depuis novembre 2004, plus aucun coup de fusil n’a été échangé entre les FANCI et les rebelles. C’est dans cette atmosphère de décrispation, propice à la discussion, que M. Bédié s’était réconcilié avec M. Alassane Ouattara ; réconciliation qui avait d’ailleurs provoqué la colère de M. L.-Dona Fologo et des faucons de la refondation, qui avaient taxé M. Bédié de traître à la République et à la Nation, estimant que cette réconciliation se faisait contre quelqu’un. Contre qui alors s’est faite la réconciliation entre Gbagbo et Blaise Compaoré, et entre Gbagbo et Soro ?

En octobre 2005, c’est M. Gbagbo qui incitait l’opposition à aller à l’élection présidentielle. Cette obsession de l’élection (que je ne partageais pas) m’avait d’ailleurs emmené à écrire (encore) un long article (comme j’en ai l’habitude) intitulé « Octobre 2005, la redoutable échéance », où je montrais que l’essentiel n’était pas d’aller aux élections, mais de régler d’abord les problèmes principiels qui nous avaient conduits à la déchirure. Dans cet article, je me suis aussi insurgé contre ceux qui avaient blâmé la réconciliation Bédié-Ouattara. Et j’avais souhaité que M. Gbagbo tende la main à la rébellion, et qu’il tende aussi la main à M. Ouattara. J’avais alors été conspué par les journaux bleus des refondateurs.

C’est donc dans un climat d’arrêt total de la belligérance obtenu sous M. Seydou Diarra, que M. Charles Konan Banny a pris fonction en décembre 2005 en tant que Premier ministre. Durant les 15 mois de la Primature de M. Banny, il n y a eu, non plus, aucun acte de belligérance armée entre les FANCI et les rebelles : la guerre était donc finie, bel et bien finie. Depuis longtemps. Avant, bien avant l’accord de Ouaga — qui n’est intervenu qu’en 2007.

Alors, pourquoi M. Gbagbo veut-il nous faire croire que c’est lui qui avait compris qu’il fallait tendre la main à l’ennemi pour qu’on ait la paix ? Il a bien été plutôt celui qui a retardé le processus de paix. S’il nous avait écouté, s’il avait fait ce que les bons pensants d’ici et la Communauté internationale lui avaient demandé de faire, la Côte en serait peut-être aujourd’hui à préparer, après la tornade de septembre 2002, la seconde élection, conformément aux délais constitutionnels.

Je suis donc étonné qu’on veuille nous faire croire que c’est l’accord de Ouaga qui a ramené la paix ; une paix qui fut déjà obtenue depuis Lomé (le cessez-le feu) ; une paix renforcée par Marcoussis ; une paix régulièrement rompue par M. Gbagbo et ses refondateurs décidés à faire la guerre ; une paix maintenue par M. Seydou Diarra ; une paix confirmée par M. Charles Konan Banny sous le règne duquel le retour des fonctionnaires dans les zones sous occupées s’était effectué, prolongeant ainsi l’action de M. Seydou Diarra ; car c’est bel et bien sous la primature de M. Diarra que le mouvement de rétablissement de l’administration étatique dans les zones occupées a commencé. Et M. Gbagbo veut aujourd’hui nous faire croire que tout cela n’a pas eu lieu ; et que c’est lui et Soro qui sont à la source de ces avancées considérables dans la recherche de solutions à la crise ivoirienne. Ceci s’appelle une imposture. De la récupération. Ce n’est pas vrai. Ivoiriens, on vous ment, une fois de plus. Arrêtons ce jeu mesquin et malsain.

Crise ivoirienne (5) : Accord de Ouaga, redéploiement - Les contre vérités et inélégances de Gbagbo : La vérité sur le redéploiement

M. Gbagbo dit : « Ce pourquoi je suis content aujourd’hui, c’est que sur tous les problèmes, il n’y a plus de désaccord de principe (...)C’est très différent de la situation antérieure. Nous sommes d’accord sur tous les principes. Maintenant, il faut y arriver. On peut parler du redéploiement de l’administration. A ce sujet, je suis allé visiter la région des Savanes comme dans d’autres régions. Les préfets, secrétaires généraux de préfecture, sous-préfets sont tous en place. Mais ce qu’ils n’ont pas et qui n’est pas écrit dans les accords, ce sont les maisons. Ils n’ont plus de bureaux. Donc ils sont là, physiquement présents dans les départements mais ils n’ont pas de moyens de travail, de voiture. Aussi bien les sous-préfets que les secrétaires généraux ».

Non, évitons la surenchère facile : ce n’est pas l’Accord de Ouaga qui a enclenché le processus de redéploiement de l’administration. Ceci avait été fait sous Seydou Diarra et sous Banny. C’est justement à cause de ce manque de moyens (véhicules, maisons - en plus de l’insécurité créée par les bellicistes du camp présidentiel) dont parle M. Gbagbo que ces fonctionnaires sont retournés à Abidjan, s’asseoir chez eux, après avoir encaissé leurs primes de déplacement et de redéployés. Le cabinet du Premier ministre Charles K. Banny avait réalisé le redéploiement à un niveau estimé à l’époque par le ministre Bamba Cheick Daniel, à environ 70%. Membre à cette époque du cabinet de M. Banny, j’ai participé à cette séance de travail, évaluative. Que signifient donc ces contre vérités flagrantes que nous inflige M. Gbagbo ?

Non, et je le répète : ce n’est pas Ouaga qui nous a apporté la paix. Depuis novembre 2004, tout acte de belligérance avait cessé sur le territoire. Et nous devons cela à l’action de M. Seydou Diarra dont j’ai pu mesurer le volume de travail accompli dans le sens de la paix, quand j’ai été appelé au cabinet de M. Banny où j’ai eu le le privilège de voir et examiner ces dossiers. Et puis, entendons-nous bien : ce que les Ivoiriens attendaient de l’accord de Ouaga, c’étaient le désarmement et les élections. Où en est-on ?

- le désarmement a-t-il eu lieu ? Les élections se sont-elles tenues ? Non, non. Ouaga est donc un échec qu’on veut travestir, de manière démagogique, en réussite. Certes, on pourrait trouver des circonstances atténuantes à cet échec ; toujours est-il que c’est un échec dans la mesure où l’objectif ou les objectifs majeurs de cet accord n’ont pas été atteints.

C’est tout de même inconvenant que M. Gbagbo veuille nous faire croire qu’avant lui et Soro, personne (ni Diarra ni Banny) n’avait accompli aucun travail positif en faveur de la paix. L’élégance administrative sied qu’on reconnaisse le travail effectué par des collaborateurs de haut niveau comme l’ont été MM Diarra et Banny. Un peu d’élégance, M. Gbagbo. Etre politicien (c’est-à-dire calculateur, rusé, machiavélique, mesquin) n’est pas absolument un mérite.

Toujours à propos de la paix, M. Gbagbo nous dit ceci : "On n’est plus au stade de 2003, 2004, 2005, 2006 où c’était la galère (pour parler comme les Abidjanais. C’était tragique. Mais aujourd’hui, quand vous passez, les boîtes de nuit, les dancings, les maquis sont pleins. Et ça, ce sont les critères réels de mesure de la paix ».

Une seule question à M. Gbagbo. Connaît-il vraiment, comme on le prétend, la Côte d’Ivoire ? Les Ivoiriens ont toujours dansé, fréquenté les maquis. Passés les premiers moments de panique du mois de septembre 2002, ce peuple avait renoué avec sa vie de vices nocturnes. C’est même durant les périodes chaudes de 2003 et 2004 qu’est né et s’est développé le Coupé décalé. Alors si, comme nous le dit M. Gbagbo, le fonctionnement des boîtes de nuit, des dancings et des maquis sont « les critères réels de mesure de la paix », c’est que les Ivoiriens étaient en paix depuis longtemps. En tout cas, avant l’accord de Ouaga. Et ce ne sont pas les jouisseurs de refondateurs, ni les abonnés de la rue princesse, qui vont nous contredire sur ce point précis. On 2006, les Ivoiriens avaient même dansé dans les rues quand les Eléphants avaient battu le Cameroun et le Nigeria à la CAN ; ils ont dansé des nuits entières dans les boîtes de nuits, bu des tonnes d’alcool dans les maquis, quand les Eléphants avaient été qualifiés à la Coupe du monde. Et ces événements précèdent l’accord de Ouaga. Alors, que M. Gbagbo arrête de distraire le peuple ivoirien par des contre vérités flagrantes.

Crise ivoirienne (6) : Accord de Ouaga, redéploiement - Les contre vérités et inélégances de Gbagbo : M. Gbagbo et les libertés citoyennes

M. Gbagbo, qui se réclame du socialisme, menace des travailleurs grévistes de radiation. A la question à lui posée par un des journalistes réalisateurs de l’interview, à propos des libertés citoyennes et du droit de grève, le chef de l’Etat qu’il est, répond ceci. « Oui, je suis un défenseur des libertés et continue de le faire. Mais je ne suis pas pour la mort de mon pays. Il y a des moments où il faut savoir faire les choses. Nous définissons nos libertés dans le cadre de la République de Côte d’Ivoire. Si la République de Côte d’Ivoire n’existe plus, qu’elle s’effondre, l’Etat s’effondre, les institutions de la République s’effondrent. (…) Chacun a ses instruments de combat. Mon rôle est de défendre la Constitution, les libertés, le droit de grève mais c’est aussi défendre, avant tout, l’Etat de Côte d’Ivoire ».

Propos étonnant de la part de quelqu’un dont l’action, quand il était dans l’opposition, avait toujours été de bloquer le fonctionnement de l’appareil républicain : empêcher l’Assemblée nationale de siéger ; empêcher des citoyens de faire usage de leur droit de vote (boycott actif), paralyser l’administration et l’économie du pays — opérations villes mortes, marches intempestives, etc., et tant de ces choses qu’il faisait contre les régimes qui l’ont précédé. Finalement, à écouter cet homme, on se rend compte que, pour lui, la République et l’Etat n’existent que lorsqu’il est, lui, au pouvoir, mais pas quand les autres sont au pouvoir.


M. Gbagbo s’autoproclame, dans cette interview, un défenseur des libertés. Ainsi quand il fait gazer, à Yopougon et à Adjamé, des ménagères qui manifestaient contre la cherté de la vie, il démontre son attachement aux libertés citoyennes. Quand son régime répressif jette, à Vridi, sur des victimes des déchets toxiques qui manifestaient pour réclamer plus de justice à leur égard, des chiens dressés pour mordre (et ils ont effectivement mordu les manifestants — comme cela se faisait contre les Noirs sous le régime raciste de l’apartheid), M. Gbagbo se montre là, comme un garant des libertés. Quand il fait brûler les imprimeries et les sièges des journaux de l’opposition, il se montre protecteur des libertés citoyennes. Quand le faible Assalé croupit à la Maca pour avoir dénoncé ce que tout le monde sait dans ce pays, et que le chef de l’Etat qu’il est se montre sourd à toutes les interventions et appel à la libération de ce jeune homme, M. Gbagbo se montre gardien de nos libertés. Inouï !!!


Quand le pr Alexandre Ayé Ayé est injustement détenu à la Maca pour tentative (non prouvée) de coup d’Etat, M. Gbagbo nous donne là aussi, les preuves de son attachement aux liberté citoyennes. M. Gbagbo se moque vraiment de nous.


Enfin, la meilleure — ou la pire, pourrait-on dire. A propos de l’utilisation abusive des medias d’Etat au détriment de l’opposition et pour la promotion de son image personnelle, M. Gbagbo nous assène un véritable coup de massue : «
Il y en a qui ne sont pas président, et ils veulent passer à la télévision comme s’ils étaient présidents. Il y en a qui voudraient même à la limite faire des messages de chef de l’Etat à ma place. Bon, il faut leur dire d’attendre les élections et puis on va voir. S’ils sont élus, on verra ; s’ils ne sont pas élus, ils attendront cinq ans encore (4) ».

Soit ! Mais je voudrais, ici, inviter les Ivoiriens à lire ce que M. Gbagbo disait à l’encontre de M. Bédié, au sujet de l’utilisation des medias d’Etat. Non, chers concitoyens, vous n’en reviendrez pas ; lisez avec moi :
« Les medias d’Etat font montre d’indignité en Côte d’Ivoire. Ceux qui animent la radio et la télévision se montrent inféodés au PDCI. Je n’avais jamais pensé qu’à l’heure du multipartisme, des Ivoiriens occupant ces postes-là se conduiraient de cette manière. Je suis vraiment indigné par leur comportement (...) Je parle de faits (…). Je vous dis que la radio et la télévision sont à la dévotion du parti au pouvoir. Vous ne pouvez pas ouvrir (sic !) la télévision sans voir la tête de Bédié ou encore un défilé du PDCI. C’est indigne. Totalement indigne (5) ».

Vous n’en revenez pas, hein ? Eh oui, c’est bien Gbagbo Laurent qui tient ces propos.
On peut conclure sur cette note, en paraphrasant le célèbre chanteur : « Est-ce que cet homme est sérieux ? ».

Note :
4/ Quotidien Soir INFO N° 4053 du jeudi 06 mars 2008, p.6.
5/ Laurent Gbagbo, in Le temps de l'espoir, Entretiens avec Honoré de Sumo, Johannesbourg, les Editions continentale, 1995,

lundi 17 mars 2008

Présidentielle 2008 ( ?) (1) : les menaces d’un rendez-vous de l’apocalypse

Comme il y a de cela trois ans (à l’approche d’octobre 2005 ― la redoutable échéance1), la fièvre de la présidentielle à venir s’est saisie des différents protagonistes de la crise ivoirienne. Ici et là, on affûte les armes, au figuré comme au propre. C’est que, sous nos cieux de pays sous développés économiquement et mentalement, les échéances électorales sont avant tout, des rendez-vous avec la belligérance : menaces, jurons, armes, proclamation anticipée des résultats, atmosphères d’inquiétude, cris dans la nuit striées de revendications et de protestations, policiers tirant sur des foules aux mains nues, un dictateur tricheur (comme en savent fabriquer les tropiques), le regard illuminé, en appelant à l’extermination de l’ennemi pour la défense de la légalité républicaine et de la patrie en danger ; puis, après les massacres, tendant la main à l’opposition pour la composition d’un « Gouvernement de Réconciliation nationale » ou de « large ouverture » (encore des nègreries). Au bout de la chaîne, une Communauté internationale lasse de tous ces mauvais scénarios nègres…

Voilà ce que sont que les élections, en Afrique ― l’Afrique noire, précisément. Et c’est ce que la Côte d’Ivoire de Gbagbo, de Bédié et d’Alassane s’apprête à nous servir sous peu : une consultation tendue, crispante, présage d’une élection calamiteuse et inévitablement conflictuelle. Une élection dangereuse surtout, qui s’offre à mes yeux comme un tragique rendez-vous de l’apocalypse.

A mon avis, et selon toute vraisemblance, ces élections connaîtront trois phases : la première verra se dérouler le plan des refondateurs pour accaparer le pouvoir ; la seconde exposera les scènes classiques qui ornent les décors des élections ‘‘nègres’’ : le tableau des tueries (planifiées par le camp présidentiel) ; la troisième dévoilera l’ultime plan qui mettra en relief ce que j’appelle « la folie de Gbagbo » : l’annonce d’une sécession par la création d’un gbagbo land à l’Ouest où le reste de ses troupes va se replier ― en cas de résistance farouche des forces de refus du hold-up électoral qu’il s’apprête à faire ― pour rejoindre le gros des Forces armées du nouvel Etat (L’Eburnie) qu’il aura créé. Rappelez-vous qu’en janvier 2006, il a dit (voir Frat. Mat) que lui aussi créera sa rébellion quand d’autres régimes lui succéderont, en représailles aux contrariétés qu’il a subies durant ses mandats. Dans un cas comme dans un autre, nous sommes au seuil de l’apocalypse et, au-delà les apparences, jamais autant qu’aujourd’hui, notre pays n’a été aussi près du gouffre.


Note
1/ Titre d’un article de Tiburce Koffi, in le Nouveau Réveil, octobre 2005.

Prochain article
Présidentielle 2008 (?) : Le plan des refondateurs

Présidentielle 2008 (?) (2) : le plan des refondateurs (1)

Des analystes plus perspicaces et mieux armés que moi l’ont déjà évoqué dans des articles publiés, ainsi que des plis confidentiels qui font partie des documents d’archives des réseaux de réflexion (il y a en beaucoup en ce moment) sur la crise ivoirienne. Dans tous les cercles où, à l’instar d’autres intellectuels du pays, j’ai été souvent invité pour participer à des réflexions sur l’issue de la présidentielle prochaine, les conclusions sont presque les mêmes, à quelques détails près : Gbagbo et ses refondateurs feront tout pour confisquer le pouvoir d’Etat, fusse au prix de leurs vies ; au prix de la vie des Ivoiriens, surtout.

Les choses seront ainsi, pour trois raisons que j’exposerai plus loin. La plus essentielle d’entre toutes, relève de la psychiatrie, ou tout au moins, de la psychanalyse : le mal insidieux qui a habité et sali l’âme de nombreux et célèbres empereurs, tout au long de l’histoire. Ce mal, c’est la schizophrénie du pouvoir. Ses symptômes sont connus : l’ivresse que procure l’image de soi que vous renvoient chaque jour, les medias ; la sensation d’être Dieu parce qu’on détient entre les mains, le pouvoir de défaire des vies, d’en fabriquer, d’ordonnancer même la mort et de l’administrer ; la crainte, l’envie, la soumission et la terreur qu’on suscite autour de soi ; par-dessus tout, la tentation enivrante de la TRANSGRESSION : le pouvoir, tout pouvoir est transgressif.

Le plaisir de Néron fut ainsi de voir brûler Rome et de se délecter de la fureur des flammes dévoratrices ; celui de Caligula était d’expérimenter le droit de vie et de mort (surtout de mort) qu’il avait sur le peuple, en ordonnançant, par moments, des exécutions à vous procurer quelque frisson. Le plaisir de Chaka était de voir l’ennemi empalé vivant, sur un pieu jusqu’à ce qu’il expire, las de souffrances insupportables. Jules César et les Romains, sauvages, de cette époque, jouissaient de voir les gladiateurs être dévorés par les lions ou bien s’entretuer : « Ave Caesar, morituri te salutan »Bonjour César, ceux qui vont mourir te saluent ! Tel était le rituel en vigueur, en prélude à la célébration des plaisirs étranges du grand empereur romain ! Oui, comme l’écrit J. Anouilh, « Le privilège des grands, c’est d’admirer les catastrophes, de leurs terrasses. »

Idi Amine, Hitler, Pol Pot, Samory, Staline, Sékou Touré, étaient tous, des fous. Des fous lucides cependant, car ils avaient perçu, dans des moments de transe subliminale, la médiocrité du genre humain, la fragilité de la vie, enfin la puissance ― toute la puissance que donne le trône rouge du pouvoir. Et Laurent Gbagbo peut ainsi lancer cette misérable injure à l’éthique des Ivoiriens, en disant : « Si j’avais su plus tôt combien il était facile d’acheter un homme, je n’aurais pas perdu mon temps à acheter des armes ». Il est donc un corrupteur, un acheteur de consciences qui se dévoile, sans pudeur ! Et cet homme veut continuer à nous diriger. Sur quelle base éthique ?

Propos choquants, oui ; mais brillants de vérité gênante. Car Laurent Gbagbo parlait en connaissance de cause : à la période où il tenait ces paroles choquantes, il venait d’expérimenter la fragilité du genre humain, la petitesse de l’homme. Il n’avait pas eu tort. Suivez mon regard : peu de temps après, celui qui jurait sa mort il y a quelques années, exigeant sa démission immédiate, est venu occuper les locaux de la primature et est devenu, actuellement, son plus grand soutien. Et je devine d’ici, comment, des loges étincelantes de lumière du Palais présidentiel où il trône, satisfait de soi, Laurent Gbagbo doit être en train de se moquer de ce rondelet de maquisard urbain aux rêves si facilement monnayables, ce guérilleros urbain si prompt à marchander ‘‘sa’’ rébellion ! C’est cela, le plaisir des princes et des hommes qui possèdent la culture de la cruauté délicieuse : se délecter des petitesses de leurs (presque) semblables – les hommes. Un privilège des dieux. Patrick Ilboudo, un écrivain burkinabé a ainsi écrit un livre au titre très évocateur : « Le vertige du trône »…

Les peuples ne décèlent cette folie qui habite l’esprit de leurs dirigeants qu’après le temps de l’apocalypse, quand ces derniers ont fini de ruiner le monde, semant et laissant sur leurs passages, cendres, cris, cadavres et désolations. Et Laurent Gbagbo porte en lui, l’âme de ces dirigeants. Ni plus, ni moins dangereux qu’eux ; mais tout simplement, exactement comme eux. Ils sont venus pour bousculer le monde, le rendre un peu différent de ce qu’il était, avant eux. Pas forcément meilleur ni pire, mais tout simplement (ou tragiquement – c’est selon), différent.

Œil de maître d’initiation et plus exercé que tous, le poète Bottey Zadi Zaourou — Bernard Zadi, de son vrai nom — qui joua beaucoup dans sa formation, écrit alors : « Que de peines à l’année/ Que de larmes, Dowré,/Pour que pavoise aujourd’hui l’enfant prodige qu’identifia naguère et dès son berceau d’osier mon regard d’Initié/Bienvenue à toi Hermès !/Mais pourquoi donc, fils de Maïa,/Forniques-tu avec la lèpre ?/Pourquoi imposes-tu comme co-épouse à la lèpre la folie rageuse qui affole les foules » (Fer de lance, version intégrale, NEI/Neter, 2002, p.161)

A cette même page, le poète rend hommage au combat épique de ceux qui se feront appeler un peu plus tard, les refondateurs. Zadi les connaît. La plupart des têtes pensantes de la refondation sont sorties de la matrice de ses mains de pédagogue et d’idéologue. Lisez ces vers, pour mieux me comprendre : « Or/Les voici mes gaies lucioles/Mes étoiles/Mes cigales babillardes/Toute la faune des sans-culotte/Ouiii… mes jacobins germés dans le souterrain de ma main gauche et repiqués sans précaution sur le terreau des plaines d’Eburnie. » (Opus. Cit. p. 161). Le propos est profond et lourd de significations ; mais son auteur, Zadi, est un poète ; or les peuples brouillons et sauvages (comme ce que sont devenus aujourd’hui les Ivoiriens) ne sont jamais à l’écoute des poètes, ces prophètes des temps anciens où l’homme avait une oreille disponible et disposée à entendre la voix des mages. Le poète le sait ; alors, dépité, il traite son peuple de varans…

Bref, je parlais de la psychologie des schizophrènes du pouvoir. Chaque grand dirigeant (et Laurent en est un – ne serait-ce que dans sa dimension la moins utile2) est en cela, rien qu’en cela, un re-fondateur. Le règne de ces dirigeants ne passe jamais inaperçu. Ils entrent forcément dans le ventre de l’histoire, car après le fracas de leurs passages, les historiens et les survivants indiquent, toujours, une ère avant eux, une autre sous eux, et une ère après eux : il y aura ainsi la Côte d’Ivoire avant Gbagbo, la Côte d’Ivoire sous Gbagbo, et la Côte d’Ivoire après Gbagbo. Cela sera ainsi parce que Gbagbo est venu pour dé-ranger la Côte d’Ivoire en lui imprimant un ordre nouveau dont lui seul et les maîtres des secrets de l’ombre (ceux-là qui savent décrypter les grandes énigmes) ainsi que quelques analystes avisés, savent la logique. Je confesse mon ignorance sur ce plan. Bref, quel est donc le plan des refondateurs ?

Note:
2/ Il a aussi et bien sûr, des qualités. Beaucoup plus qu’on ne le croie, même.

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Le plan des refondateurs: Schémas ukrainien et kenyan


Présidentielle 2008 (?) (3): le plan des refondateurs (2) : schémas ukrainien et kenyan

Ce plan consiste, pour l’essentiel, à annoncer la victoire de Gbagbo avant la proclamation des résultats ; exactement comme les refondateurs l’ont fait en 2000 avec la complicité de la France ‘‘jospinienne’’, par le biais de rfi, en s’inspirant du schéma ukrainien. Ceux qui sont chargés de la sale besogne sont les personnes morales et physiques suivantes : la RTI, la Radio nationale, Fraternité Matin (tenue par des militants FPI et des sympathisants de Gbagbo : Brou Amessan, Eloi Oulaï, J.-B. Akrou, Ferro Bailly…), des agences de communication (elles sont nombreuses) créées par des refondateurs, les leaders des milices et autres associations terroristes (à l’exemple du GPP et de la Fesci), etc. Enfin, des soldats angolais cachés dans les locaux du Musée de Cocody qu’envisageait de construire Mel Théodore et que les refondateurs ont vendu à l’Angola. Cet édifice est situé en face de la RTI. Ces soldats angolais ont pour consigne de protéger les alentours de la RTI où n’auront accès que les refondateurs et leurs structures politiques satellites : les clubs de soutien (abusivement appelés partis politiques) et autres structures parasites (comme les syndicats et des ONG), tous animés par des personnes comme Danielle Boni Claverie, L.-D. Fologo, Aimé Appia Kabran, Mme Martine Djibo, bien sûr les inévitables Bro Grébé, Mahan Gahé, Gnamien Messou, entre autres.

Avant la proclamation officielle des résultats, les miliciens, les agences de communication, enverront des sms sur les portables des Ivoiriens ainsi qu’à l’extérieur du pays pour dire que Laurent Gbagbo est déjà en tête avec tel pourcentage (truqué et imaginaire, bien sûr) de suffrage. Cela, pour conditionner les esprits. Pendant ce temps, les chars des FANCI occuperont les artères de la capitale et des centres urbains névralgiques du pays.

La plupart des unités de soldats sont dirigés par des officiers issus de la tribu du Président. On sait leurs noms. On sait surtout la mission qui leur a été confiée : tirer sur tout contestataire. Tuer tout manifestant non favorable au hold-up électoral. De nombreux soldats (ivoiriens, angolais, libériens et sierra léonais), sous l’emprise de stupéfiants ce jour-là, et gonflés à bloc (par les propagandistes de la refondation) pour le ‘‘combat du frère’’, sont déjà prêts pour accomplir cette mission : tuer et tuer. Tuer, comme ils l’ont fait impunément en mars 2004 sur des militants désarmés de l’opposition. Car les refondateurs tueront (ils n’ont pas peur du sang), et ne reculeront devant rien pour confisquer le pouvoir.



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Le plan des refondateurs: Déroulement du vote


Présidentielle 2008 ( ?) (4): le plan des refondaterurs (3) - déroulement du vote

Il y aura trois grands espaces conflictuels de vote : le pays akyé (au sud), le pays bété (à l’ouest) et le pays baoulé (au centre). Les conflits les plus essentiels se dérouleront dans les espaces bété et baoulé. En pays bété, il sera interdit aux baoulé (nombreux dans ces régions) de participer au vote. Des miliciens de Gbagbo sont chargés d’assiéger, tôt le matin, les campements des baoulé, afin de les empêcher de se rendre aux bureaux de vote. Bien évidemment, les baoulés refuseront de se soumettre à ce dickta anti démocratique. La bagarre éclatera logiquement : ce sera le prétexte pour les miliciens et soldats enrôlés pour semer la terreur dissuasive, d’investir les campements baoulé, afin de ‘‘mater la rébellion’’ de ces allogènes. L’inévitable boucherie !

Le tableau est d’un grand intérêt psychanalytique et psychosomatique : en surimpression et à travers le temps, il traduit la version actualisée (contre les baoulé) de la rébellion (matée par Houphouët) du Guébié. Ces massacres du Guébié qui ont constitué le fonds de commerce du ministère politique de Laurent Gbagbo contre Houphouët. Gbagbo ne vit que dans l’obsession de réaliser cette vengeance de la tribu martyrisée par Houphouët, contre celle de ce dernier. Ivoiriens, lisez un peu ! Lisez les livres de Gbagbo, lisez les productions (articles de journal, revues, périodiques) des refondateurs. Relisez les anciens numéros de journaux comme L’œil du peuple, La tribune du Banco, Le Nouvel Horizon. Relisez surtout le dossier publié par le journal Notre Temps sur la crise du Guébié, au cours des années 1990. Vous y découvrirez aussi un superbe article signé de Jean-Baptiste Kouamé, en opposition au culte de Gnagbé Kragbé auquel s’était livré insidieusement ce journal dont les grosses plumes avaient pour noms, entre autres : Diégou Bailly, Séry Bailly. Relisez tout cela, Ivoiriens, et vous comprendrez mieux ce que j’écris ici. Les opérations de spoliation et de dépossession des terres culturales des paysans baoulé, et qui (selon les échos qui nous parviennent) ont cours à l’ouest, faisaient partie du programme foncier de Gnagbé Kragbé qui n’avait jamais caché son aversion pour cette tribu. Les récents papiers de Paul Koffi et de Dje KM (conf. Nouveau Réveil N° 1865 du 08 mars, p.7) confirment la lecture que je viens de faire du problème foncier à l’Ouest. Oui, les plantations sont arrachées aux paysans baoulés, exactement comme l’avait voulu Gnagbé Kragbé, l’homme dont Gbagbo est le prolongement onirique et politique.

Oui, compatriotes, crevons l’abcès une bonne fois pour toutes. Osons mettre le doigt, non pas sur, mais DANS la plaie cette fois-ci, et sortons de cet engrenage de la haine vengeresse qui, elle seule, suffit à expliquer une grande part du mal ivoirien actuel. « Je suis maintenant arrivé, séchez vos larmes !», dit ainsi Gbagbo aux populations bété venues au Palais pour lui faire acte d’allégeance. L’insolite et grave serment de Zorro que voilà ! Comment un chef d’un d’Etat de plus de 60 ethnies, peut-il se permettre de tenir de tels propos ? Et comment avons-nous pu garder le silence face à un tel dérapage langagier qui aurait dû éveiller nos soupçons ?

Peuples de Côte d’Ivoire, leaders politiques, hommes de Dieu, dites à Laurent Gbagbo de mettre fin à cette soif vengeresse qui l’habite, lui consume l’âme et pervertit son esprit aux forces du mal. C’est tout cela qui l’empêche, qui empêche la refondation, de tenir ses promesses de reconstruction de la Côte d’Ivoire. Les refondateurs sont loin d’être des gens stupides ; ils sont instruits, et ils ne sont pas plus mauvais que d’autres dirigeants. Malheureusement pour eux, le potentiel de feinte et de mal qui habite le cœur de leur chef, Gbagbo, ainsi que d’une minorité de gens de sa tribu qui l’entoure est, de trop loin, supérieur aux valeurs du bien et du progrès qui les avaient habités quand ils se lançaient (pour les plus sincères d’entre eux en tout cas) à la conquête du pouvoir d’Etat.

A l’indicamétrie3, la refondation ne peut pas être productive, car rien de positif ne peut se réaliser, quand l’esprit est en proie aux forces de la nuit et de l’obscur. La déroute surprenante et soudaine des Eléphants à cette CAN, n’est pas le fait du hasard absolu. Le mal brouille la vue. La culture de la vengeance et celle de la recherche du gain politique en tout, tarissent l’âme, flétrissent l’esprit ; et leurs ondes de chocs, négatives, sont incommensurables. Que Laurent et les quelques cadres bété tribalistes (ils ne sont tous pareils) du FPI qui l’influencent, acceptent de comprendre que ce ne sont pas les baoulé qui ont massacré le Guébié. C’est le régime d’Houphouët. Et ce régime comprenait aussi bien des baoulé que des bété (ces derniers y occupaient même des postes très importants), des sénoufos, des koulangos… bref, tout ce que la Côte d’Ivoire comptait de représentation ethnique.

Note :
3/ Indicamétrie, une science du Pr Moustapha Diabaté dont un des objets est de mesurer la quantité de valeurs qui gît dans l’esprit d’un homme, son potentiel d’agir positif et négatif.