jeudi 20 mars 2008

Crise ivoirienne (2) : Accord de Ouaga, redéploiement - Les contre vérités et inélégances de Gbagbo : La déliquescence de l’Etat

Quand, dans un pays, les rues sont barrées par des gens qui portent des tenues militaires et d’autres, de policiers ou de gendarmes (nombreux parmi eux ne sont même pas de ces corps), et qu’ils rackettent les honnêtes citoyens, ralentissent la marche de l’Economie, salissent nos villes, sans que l’autorité qui siège dans les belles loges du Palais ne puisse mettre fin à cette pratique honteuse et inadmissible, c’est que l’Etat est à terre.

Quand, dans un pays, n’importe qui peut se faire coudre ou acheter un uniforme de corps habillés, porter une kalachnikov et se balader à travers la ville, c’est que l’Etat est à terre.

Quand, dans un pays, les cadres de l’administration et les dirigeants, toutes tendances politiques confondues, pillent les caisses de l’Etat, utilisent à des fins personnelles les deniers publics, ruinent l’économie et que, interrogé par le peuple sur cette situation dramatique, le chef de l’Exécutif répond, sans pudeur : « Ce que les gens ne savent pas, c’est que la roue tourne. (…) Je ne peux pas suivre deux écureils à la fois (…) N’attendez pas de moi que je poursuive des voleurs (…) Ceux que vous avez cités ne sont pas les seuls à voler (…) », etc., c’est que l’Etat est à terre.

Quand, dans un pays, n’importe qui peut se construire une baraque dans un espace communal et habiter-là, dans la précarité, sans que cela n’inquiète ni la police ni les forces de sécurité, c’est que l’Etat est à terre.

Quand, dans un pays, des gens, parce qu’ils ont de l’argent, peuvent détruire des parcelles collectives d’espaces verts et y construire quelque château nègre pour eux-mêmes, au mépris de la qualité de vie des habitants des immeubles alentours, c’est que l’Etat est à terre.

Quand le vol, le crime, le racket, le mensonge, l’insalubrité, la prévarication, etc., sont devenues des choses admises et normales dans un pays, c’est que l’Etat est à terre.

Quand, dans un pays, la Santé, l’Ecole, le Transport, le Logement, l’Eau, le Courant, etc., sont aux mains des privés et hommes d’affaires voraces, c’est que l’Etat est à terre, vraiment à terre et qu’il traîne comme un paraplégique au sol.

Quand, dans un pays, c’est dans les rues, sur les trottoirs et les boulevards que les gens (la jeunesse surtout) se livrent au commerce illicite, devant les forces de l’ordre, c’est que l’Etat est à terre.

Quand, dans un pays, la création intellectuelle et artistique est piratée officiellement par des groupes de personnes qui font partie des protégés du chef de l’Etat, et tolérée par les dirigeants ; quand le chef de l’Etat lui-même, rend visite aux délinquants qui prospèrent dans des espaces maffieux comme la « Sorbonne » du Plateau où sont vendus, au vu et su de tout le monde (surtout du chef de l’Etat), le produit de l’effort des artistes, des penseurs et autres créateurs qui vivent et crèvent ainsi dans la misère, c’est que l’Etat est par terre : oui, un régime qui ne respecte pas et ne protège pas ses artistes est un régime maudit et indigne de diriger un peuple.

Quand, dans un pays, des étudiants, protégés et manipulés par le régime, peuvent tuer, dans l’impunité totale, des êtres humains sur les campus, les inhumer dans la brousse, sans être inquiété par quelque autorité que ce soit, c’est que l’Etat est à terre.

Quand, dans un pays, le chef de l’Etat passe le plus clair de son temps à organiser des séances d’allégeance au Palais en faisant se déplacer les populations rurales pour entendre leurs avis sur… quoi — alors que les députés existent qui sont sensés représenter le peuple — c’est que l’Etat est à terre ; parce que le chef de ce pays ne sait pas que les députés représentent le peuple qu’il n’est donc plus utile de déplacer jusqu’au Palais.

Au total, quand, dans un pays, tout se fait dans l’indiscipline, le désordre, quand plus personne n’a peur de cette chose impersonnelle, immatérielle, mais redoutable, qu’on appelle l’Etat, c’est que l’Etat est à terre. Et c’est dans cette situation qu’est la Côte d’Ivoire actuelle, sous Gbagbo. Il faut donc ne pas savoir ce qu’est un Etat pour être fier de ce qui nous sert d’Etat dans la Côte d’Ivoire d’aujourd’hui. Non : manifestement, M. Gbagbo ne sait pas ce que c’est qu’un Etat, moins encore son mode de fonctionnement. Il faut qu’il apprenne à savoir ces choses élémentaires en politique, s’il veut continuer à nous diriger.

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