jeudi 20 mars 2008

Crise ivoirienne (3) : Accord de Ouaga, redéploiement -Les contre vérités et inélégances de Gbagbo : Evitez la surenchère

De l’accord de Ouaga, Gbagbo dit : « Je suis très fier. Quand cette crise a éclaté, nous avons parcouru le monde entier pour faire des négociations. Nous avons signé de nombreux accords jusqu’à ce que dans les responsabilités qui sont les miennes, je comprenne qu’il y avait beaucoup de choses bidons dans tout ce qu’on faisait. (…). Je suis fier qu’on soit arrivé au résultat auquel nous sommes tous parvenus (...) Nous avons signé l’Accord de Ouagadougou le 4 mars 2007. Entre le 4 mars 2007 et aujourd’hui, il y a un an. Chers amis, regardez vous-mêmes, faites le point. Avant, on parlait de guerre; aujourd’hui, on parle d’élections. C’est un progrès immense (…).Je suis fier de l’Accord de Ouagadougou que nous avons signé ».

Les propos que tient le chef de l’exécutif ivoirien sur les bienfaits de l’accord de Ouaga ne sont pas tout à fait exacts. Il nous faire deux précisions importantes.

1 - Il est inadmissible que M. Gbagbo nous dise qu’il lui a fallu quatre ans pour se rendre compte qu’ « il y avait beaucoup de chose bidons dans tout ce qu’on faisait. » Quatre ans d’égarement dans la vie d’un peuple, ce n’est pas peu. En avouant ainsi avoir mis du temps à comprendre ces choses, il nous donne la prouve de son manque de vision et de capacité d’anticipation. Je rappelle qu’il y avait longtemps que M. Bédié était favorable au fait que la Primature revienne à la rébellion. Il fut taxé de parrain de la rébellion pour avoir exprimé ce point de vue. Je rappelle aussi que M. Soro Guillaume avait toujours dit, depuis Marcoussis, que la Primature devait revenir à la rébellion, pour respecter le parallélisme des forces en présence. Je rappelle encore que c’est bien M. Gbagbo qui nous avait dit que Marcoussis était un médicament amer, mais qu’il fallait l’appliquer. Qu’est-ce qui rendait Marcoussis amer ? Tout simplement le fait qu’il nous imposait la cohabitation au sein du gouvernement, avec des rebelles qui avaient pris des armes pour remettre en cause la légalité républicaine et constitutionnelle.

Marcoussis n’avait pas donné la Primature à la rébellion. Que nous auraient dit Gbagbo et ses refondateurs, si Marcoussis nous avait proposé de donner la Primature à la rébellion ? Ils auraient dénoncé (encore) un complot français, de nature chiraquienne, visant à affaiblir leur pouvoir ; et ils auraient poussé les enfants des pauvres dans la rue, qui seraient allés se faire massacrer (encore) pour eux. Quatre ans de tâtonnements plus tard, M. Gbagbo donne (enfin) la Primature à la rébellion et affirme, l’air étrangement satisfait : « Quand cette crise a éclaté, nous avons parcouru le monde entier pour faire des négociations. Nous avons signé de nombreux accords jusqu’à ce que dans les responsabilités qui sont les miennes, je comprenne qu’il y avait beaucoup de choses bidons dans tout ce qu’on faisait ». Enfin, de qui se moque M. Gbagbo ?

M. Gbagbo et les refondateurs ont toujours refusé d’appliquer, au nom de la souveraineté nationale et des prérogatives que leur donnait la Constitution ivoirienne, ce que la Communauté internationale nous demandait de faire. Ils ont géré cette crise comme ils l’entendaient la gérer, refusant le principe du « Plein pouvoirs » au Premier ministre. Et M. Gbagbo ne se gênait pas de clamer devant ses militants, chaque fois qu’il refusait d’appliquer ce qu’on lui proposait : « Je tiens toujours la barre (...) C’est moi qui ait le ballon, je n’ai encore fait la passe à personne !!! » Ces propos sont encore là, dans les journaux, et dans nos mémoires, en tout cas, dans la mienne. Comment donc, M. Gbagbo peut-il aujourd’hui affirmer que la crise a duré à cause des solutions ‘‘bidons’’ que lui avaient imposées la Communauté internationale ? Incroyable !

Dès son retour de Rome en septembre 2002, n’est-ce pas M. Gbagbo qui avait refusé de négocier avec la rébellion, brandissant plutôt l’épée contre l’agresseur ? Et cela, malgré les conseils de M. Bédié (qui avait proposé la négociation directe avec la rébellion) ; malgré aussi les avis de M. Dominique de Villepin qui lui, n’avait eu de cesse de dire : « La solution à la crise ivoirienne n’est pas militaire. »

Comme de nombreux Ivoiriens alors frappés de cécité, j’avais suivi M. Gbagbo dont j’appréciais l’ardeur guerrière. Je confesse avoir été de ceux qui l’avaient encouragé, dans des articles publiés à Notre voie, et Notr’Aurore, à faire l’option de la guerre, plutôt que celle de la négociation qui, dans mon esprit, serait « une vile capitulation (2) », taxant même M. Dominique de Villepin de "vil pain". Comme de nombreux conseillers autour de lui, j’avais cédé à l’émotion plutôt qu’à la raison. Un an plus tard, exactement en mars 2004, quand j’eux compris mon erreur et que j’entrepris de ramener les bellicistes du camp présidentiel à la thèse de la négociation et à l’idéal de paix, je fus désavoué, conspué même ; et des mesures d’ostracisme furent prises à mon encontre au Palais. On m’empêcha désormais d’avoir accès au Prince comme ce fut le cas d’Eugène Djué qui lui, fut plus malchanceux que moi(3). C’est dans cette atmosphère de suspicion et de doute sur ma loyauté envers le camp présidentiel, que je pris des distances vis-à-vis du Palais. Et, depuis ces jours, les choses s’éclairèrent progressivement dans mon esprit, et je compris la trajectoire dans laquelle je devais désormais engager mon combat. Je devins alors attentif, très attentif et surtout, critique aux discours et comportements des refondateurs et de leur chef.

Affirmer donc, comme le fait M. Gbagbo, que c’est la Communauté internationale qui nous avait indiqué des voies ‘‘bidons’’ (parce que autres que celle de la paix avec Soro), est une grave contre vérité historique : un mensonge républicain comme savent nous en servir Gbagbo et ses refondateurs.

Note :
2/ « Cri de révolte », article de Tiburce Koffi publié à « Notre Voie », octobre (?) 2002.
3/ Il fut tabassé au Palais.

2 commentaires:

Anonyme a dit…

Vraiment je suis deçu de vous, je ne vous reconnais plus. est-ce la même personne qui a écrit le paradis infernal? Voulez-vous regler le compte à qui, Cela ne vous ressemble pas ressaisissez vous.

gbapleu a dit…

J'aime bien le mode d'agencer vos idées de les exposer et surtout la méthode d'exploiter la critique, seulement voilà , je trouve qu'il faudrait aller au-délà du discours partisant et prendre lechemin qui mène au bien commun, je voudrais e vous plus d'équité et d'équilibre . Gbap.