lundi 17 mars 2008

Présidentielle 2008 ( ?) (12) : la hantise de l'avenir (3) : le Tribunal Pénal International

Ils sont nombreux, les refondateurs (des plus illustres aux plus anonymes) qui figurent sur la liste des criminels qui comparaîtront devant le TPI. Ils portent, dans les dossiers qui les accablent, maint crime crapuleux perpétrés sur : Benoît Dakoury, Emile Téhé, Robert Guéi, ASH, Boga Doudou, Jean Hélène, les morts du Boulevard de la Vie (filmés par J.-P. Dahili – repos à son âme !), G.-André Kieffer, les plus de 200 morts, assassinés, du 25 mars 2004, le jardinier de Ouattara, séquestré par des hommes du Palais, martyrisé et froidement tué dans des locaux du palais de la présidence (selon toutes vraisemblances), puis jeté dans la lagune. Et bien d’autres crimes encore.

La situation est la même, du côté des rebelles : ils savent qu’ils sont la cible du TPI : celui qui a ordonné l’exécution des 93 gendarmes de Bouaké qu’il a fait enterrer dans une fosse commune ! Ceux qui ont fait éclater les sexes des danseurs d’Adjanou de Bouaké en tirant des balles dans leurs intimités féminines (les scènes ont été filmées) ; celui qui a fait mourir d’étouffement une soixantaine de personnes, des êtres humains, enfermés dans un conteneur exposé sous le soleil de Korhogo ; ceux qui ont brûlé des êtres humains dans les villes de l’Ouest montagneux, violé des femmes, blessé et marqué à vie, des milliers d’Ivoiriens, etc. Le TPI a ces dossiers. Et tous ces assassins seront capturés, le moment venu, et mis à la disposition de la Justice internationale.

Ils seront jugés tout comme Milosevic (à la peau Blanche) l’a été. Ils seront jugés tout comme Pinochet (à la peau Blanche) a été jugé. Ils seront jugés… comme Charles Taylor (à la peau noire) est jugé en ce moment. Ils seront jugés car cette Justice n’est ni raciale, ni raciste. Elle se veut Justice, pour rappeler à tous ceux qui ont humilié leurs semblables et offensé l’éthique millénaire des nations civilisées (le respect de la vie), que nul n’est au-dessus de la loi. Et pour cela, les refondateurs comparaîtront devant le TPI… dès qu’ils ne seront plus au pouvoir. C’est le sens du combat que je mène. Exactement comme, en Europe, des intellectuels et des hommes droits se sont engagés dans le combat contre les ex nazis en continuant de les traquer et les débusquer, et cela, plus d’un demi siècle après la tragédie des Juifs. Et je traquerai les criminels d’entre les refondateurs, ainsi que les assassins d’entre les rebelles. C’est le combat de ma vie, et je le mènerai, sans concession. Afin que plus jamais, dans ce pays, un dirigeant voyou ne pousse ses militants au crime facile et impuni.

Les refondateurs ont peur du TPI. C’est pourquoi ils s’accrocheront au pouvoir. Et c’est aussi pourquoi ils sont soutenus en ce moment par la branche gbagboïste de la rébellion, coupable d’exactions pendables, qui se cachait au sein des Forces nouvelles. Le combat que ces deux alliés se préparent à livrer aux forces internes du refus de la dictature en spoliant le peuple ivoirien d’une victoire évidente, réunit tous les risques d’être un affrontement sans merci, sanglant et même suicidaire. Nous ne sommes pas loin du syndrome Kenyan et même du Rwanda, chers compatriotes. Ne vous fiez pas au climat apparent d’apaisement. Les grandes catastrophes ont toujours été précédées d’un silence majestueux. Je vous le répète : qu’il conserve le pouvoir ou qu’il le perde, Gbagbo va faire tuer beaucoup de gens. Sommes-nous prêts à en découdre avec le dictateur ? Ce dernier est-il sûr d’avoir les moyens de tuer (au propre et au figuré) plus de la moitié des Ivoiriens ?

Voilà légèrement exposés, les différents enjeux des prochaines élections : la préservation d’un pouvoir, en vue de continuer de jouir des fastes de la régence et se protéger du TPI ; la restauration d’un pouvoir perdu, en vue de prendre une revanche sur l’histoire et laver l’humiliation de décembre 1999 ; la prise du pouvoir, afin de parachever un combat identitaire et satisfaire un ego individuel ou collectif. Ces différents enjeux sont incarnés par Gbagbo et le FPI, Bédié et le PDCI, Ouattara et le RDR. Nulle part, vous n’y verrez le souci de relever l’image de la Côte d’Ivoire et de créer une « Société de confiance » — selon l’heureuse terminologie d’Alain Peyrefitte. Ce ne sont pas des ambitions constructives ; ce ne sont pas des utopies capables d’exalter un peuple et l’emmener à la sublimation de soi ; bien au contraire, elles nous donnent, toutes, des raisons d’avoir peur de ces élections, surtout quand on pense au cri de ‘‘guerre’’ du FPI : « On gagne ou on gagne ». C’est l’alternative absolutiste qui nie l’alternative en tant que choix et levier de la démocratie. C’est la plus belle et la plus horrible affirmation de la dictature que je n’aie jamais entendue. Ce slogan est, en soi, une menace pour la stabilité de ce pays, un défi à la démocratie ; pis, une offense à la sagesse. Et il est promu par les refondateurs !

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