lundi 17 mars 2008

Présidentielle 2008 ( ?) (6): les crimes planifiés

Ici, sont prévus : l’incendie des sièges des journaux de l’opposition ; l’obstruction à la parution et diffusion de leurs journaux par le procédé déjà utilisé en novembre 2004 contre la presse libre ; enfin, l’élimination de personnes physiques bien ciblées. Figurent sur cette liste noire, entre autres, les noms suivants : Venance Konan, le Pr Koné Sidick, Assalé Tiémoko, Guy-Charles Wayoro, Christiane Djahué, Ama Téhua, le Pr Yacouba Konaté, Dégny Maixent (qui a déjà échappé de justesse aux tueries, en 2004), Tiburce Koffi, le Lt-colonel Jules Yao Yao, Constance Yaï, André Sylver Konan, Henri Amouzou, Anaky Kobénan, Mme Faust Didi, Claude Tamo, Me Blessi Chrisostome, Adjoumani, Me Jeannot Ahoussou K., Thomas Bahinchi, KKB, Me Metennon, Patrick Achi, Ayié Ayié Alexandre…

Dès les premiers coups de feu, ces personnes devront savoir que leur sort est scellé, si elles se trouvent encore sur le territoire ivoirien. Leurs domiciles ont été repérés et identifiés. La plupart d’entre elles sont suivies, espionnées par les exécuteurs des Hautes œuvres des refondateurs. C’est la même machine du meurtre qui a tué le médecin Dakouri, le comédien ASH, le député Téhé, les journalistes Jean Hélène, G.-André Kieffer, massacré l’entourage immédiat de Robert Guéi, tué l’étudiant Dodo Habib, etc. C’est peut-être la même machine qui a assassiné Boga Doudou dont le meurtre interpelle encore l’intelligence de tous ceux qui cherchent à comprendre les dessous de cette crise.

Les avis des spécialistes d’enquêtes sur les meurtres (que j’ai approchés à ce propos) sont formels : seuls des gens de l’entourage de Boga, munis de laissé passer, pouvaient franchir, ce jour-là, tous les barrages (ils étaient nombreux) dressés sur la rue qui menait au domicile du ministre de l’Intérieur, l’homme le plus et le mieux gardé de Côte d’Ivoire, jusque-là. Or, qui d’autres que des refondateurs de rang élevé, était proche de Boga Doudou, au point de franchir toutes ces barrières, sans être inquiété, surtout cette nuit-là… jusqu’à aller le tuer ? Tranquillement. Sans être capturé ou buté ? Où étaient ses gardes de corps ? Pour qui nous prennent donc les refondateurs ? Tout ici, porte effectivement à croire que ce sont eux qui ont tué Boga Doudou !

Bref, elle tuera, cette machine ; c’est sa raison d’être. Elle tuera, pour l’affirmation du ‘‘combat du frère’’ ; elle tuera, car elle n’a appris que cela : tuer. Faire couler le sang, souiller la terre meurtrie de ce pays naguère de paix et de concorde ― fragiles certes, mais concorde tout de même. Elle tuera, enfin, pour le triomphe des névroses d’un monarque dépassé, malade de sa propre image, et déguisé en chef d’Etat. Ah, où nous conduira cette tornade de feu ? Combien d’entre nous fera-t-il exécuter pour l’avènement de son règne ? Que lui a fait de mal ce peuple, pour qu’il lui inflige tant de tourments, tant de peines sauvages ? Et comme me reviennent à la mémoire, ces vers lumineux que Senghor(4) prête à ‘‘La Voix blanche’’, dans le procès de Chaka. (Re) lis donc ces vers, Lorenzaccio mio, et vois comme ils semblent si bien s’adresser à toi :
(…) avoueras-tu les millions d’hommes pour toi exterminés
Des régiments entiers des femmes lourdes et des enfants de lait ?
Toi, le grand pourvoyeur des vautours et des hyènes,
le poète du Vallon-de-la-Mort. (…)
Les ravins sont torrents de sang, la fontaine source de sang
Les chiens sauvages hurlent à la mort dans les plaines
où plane l’aigle de la Mort
O Chaka toi Zoulou, toi plus-que-peste et feu roulant de brousse »
Et la Voix blanche peut conclure : « Le plus grand mal, c’est de voler la douceur des narines ».
Dans ce même registre, Lorenzo, je t’invite aussi à revisiter Hugo, dans Hernani (que tu connais très bien), pour nous enivrer, rien que pour la dernière fois, du plaisir des belles Lettres.

Note:
4/ Je fais souvent référence à ce texte dans le cadre des analyses que je produis sur la crise ivoirienne. C’est un poème majeur de Senghor qui nous éclaire sur la tragédie du pouvoir. Nos inspecteurs de l’Enseignement secondaire ont raison de le toujours maintenir au programme.

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