jeudi 20 mars 2008

Crise ivoirienne (5) : Accord de Ouaga, redéploiement - Les contre vérités et inélégances de Gbagbo : La vérité sur le redéploiement

M. Gbagbo dit : « Ce pourquoi je suis content aujourd’hui, c’est que sur tous les problèmes, il n’y a plus de désaccord de principe (...)C’est très différent de la situation antérieure. Nous sommes d’accord sur tous les principes. Maintenant, il faut y arriver. On peut parler du redéploiement de l’administration. A ce sujet, je suis allé visiter la région des Savanes comme dans d’autres régions. Les préfets, secrétaires généraux de préfecture, sous-préfets sont tous en place. Mais ce qu’ils n’ont pas et qui n’est pas écrit dans les accords, ce sont les maisons. Ils n’ont plus de bureaux. Donc ils sont là, physiquement présents dans les départements mais ils n’ont pas de moyens de travail, de voiture. Aussi bien les sous-préfets que les secrétaires généraux ».

Non, évitons la surenchère facile : ce n’est pas l’Accord de Ouaga qui a enclenché le processus de redéploiement de l’administration. Ceci avait été fait sous Seydou Diarra et sous Banny. C’est justement à cause de ce manque de moyens (véhicules, maisons - en plus de l’insécurité créée par les bellicistes du camp présidentiel) dont parle M. Gbagbo que ces fonctionnaires sont retournés à Abidjan, s’asseoir chez eux, après avoir encaissé leurs primes de déplacement et de redéployés. Le cabinet du Premier ministre Charles K. Banny avait réalisé le redéploiement à un niveau estimé à l’époque par le ministre Bamba Cheick Daniel, à environ 70%. Membre à cette époque du cabinet de M. Banny, j’ai participé à cette séance de travail, évaluative. Que signifient donc ces contre vérités flagrantes que nous inflige M. Gbagbo ?

Non, et je le répète : ce n’est pas Ouaga qui nous a apporté la paix. Depuis novembre 2004, tout acte de belligérance avait cessé sur le territoire. Et nous devons cela à l’action de M. Seydou Diarra dont j’ai pu mesurer le volume de travail accompli dans le sens de la paix, quand j’ai été appelé au cabinet de M. Banny où j’ai eu le le privilège de voir et examiner ces dossiers. Et puis, entendons-nous bien : ce que les Ivoiriens attendaient de l’accord de Ouaga, c’étaient le désarmement et les élections. Où en est-on ?

- le désarmement a-t-il eu lieu ? Les élections se sont-elles tenues ? Non, non. Ouaga est donc un échec qu’on veut travestir, de manière démagogique, en réussite. Certes, on pourrait trouver des circonstances atténuantes à cet échec ; toujours est-il que c’est un échec dans la mesure où l’objectif ou les objectifs majeurs de cet accord n’ont pas été atteints.

C’est tout de même inconvenant que M. Gbagbo veuille nous faire croire qu’avant lui et Soro, personne (ni Diarra ni Banny) n’avait accompli aucun travail positif en faveur de la paix. L’élégance administrative sied qu’on reconnaisse le travail effectué par des collaborateurs de haut niveau comme l’ont été MM Diarra et Banny. Un peu d’élégance, M. Gbagbo. Etre politicien (c’est-à-dire calculateur, rusé, machiavélique, mesquin) n’est pas absolument un mérite.

Toujours à propos de la paix, M. Gbagbo nous dit ceci : "On n’est plus au stade de 2003, 2004, 2005, 2006 où c’était la galère (pour parler comme les Abidjanais. C’était tragique. Mais aujourd’hui, quand vous passez, les boîtes de nuit, les dancings, les maquis sont pleins. Et ça, ce sont les critères réels de mesure de la paix ».

Une seule question à M. Gbagbo. Connaît-il vraiment, comme on le prétend, la Côte d’Ivoire ? Les Ivoiriens ont toujours dansé, fréquenté les maquis. Passés les premiers moments de panique du mois de septembre 2002, ce peuple avait renoué avec sa vie de vices nocturnes. C’est même durant les périodes chaudes de 2003 et 2004 qu’est né et s’est développé le Coupé décalé. Alors si, comme nous le dit M. Gbagbo, le fonctionnement des boîtes de nuit, des dancings et des maquis sont « les critères réels de mesure de la paix », c’est que les Ivoiriens étaient en paix depuis longtemps. En tout cas, avant l’accord de Ouaga. Et ce ne sont pas les jouisseurs de refondateurs, ni les abonnés de la rue princesse, qui vont nous contredire sur ce point précis. On 2006, les Ivoiriens avaient même dansé dans les rues quand les Eléphants avaient battu le Cameroun et le Nigeria à la CAN ; ils ont dansé des nuits entières dans les boîtes de nuits, bu des tonnes d’alcool dans les maquis, quand les Eléphants avaient été qualifiés à la Coupe du monde. Et ces événements précèdent l’accord de Ouaga. Alors, que M. Gbagbo arrête de distraire le peuple ivoirien par des contre vérités flagrantes.

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